Emily Orta à la galerie Brigitte Mulholland
Je vous invite à découvrir cette exposition. Plusieurs raisons, pour y aller,
une jeune artiste céramiste de 25 ans installée à Paris, déjà très douée,
un ensemble de créations, impressionnant, sur le corps, la nature et des êtres hybrides fantasmés,
une galeriste, Brigitte Mulholland qui, quittant New York, a fait le choix de s'installer à Paris où elle a ouvert sa galerie en avril de cette année,
et qui consacre une exposition entière à une sculptrice céramiste.
Brigitte Mulholland nous a transmis le texte de présentation que vous trouverez ci-après. Je l'en remercie. Bernard Bachelier
22 Novembre 2024 – 15 Janvier 2025
81 rue de Turenne Paris 3e
texte de la galerie
MOULDING EXTENSION
La galerie Brigitte Mulholland présente MOULDING EXTENSION, la première exposition personnelle de l’artiste (ceramiste) française Emily Orta. Trois zones distinctes, CABINET, METAMORPHOSE et BESTIAIRE, invitent le visiteur à un voyage corporel; leur propre forme corporelle est incitée à se pencher plus près, à circuler, à s’entrelacer dans la croissance des entités d’un autre monde d’Orta.
Le titre de l’exposition évoque le processus sculptural de l’artiste. La manipulation, l’invention et l’interprétation de l’argile inanimée catalysent des formes distinctives mais énigmatiques qui évoluent de la matière bactérienne charnue vers des sujets animalistes bruts se tordant dans un état de flux avant d’arriver à des chimères surréalistes entièrement formées. Tout comme le corps humain est caractérisé par un état constant de transformation cellulaire, se formant et se reformant, le travail de l’artiste s'aligne sur cette fluidité organique. Les trois zones progressivement illuminent la symbiose entre les règne matériel et royaume immatériel évoquant la mutation infinie de la chair en contraste avec la hantise éternelle de l’âme. Chaque sculpture estle fragment d’un cycle de vie et un rappel de la formation et de la reformation d’une identité tactile mais intangible.
CABINET
En entrant dans la zone primaire, CABINET dévoile un contact étroit curieux avec le microscopique, prenant son envol à partir des investigations d’Orta au musée du Moulage, Paris. Comme des fantômes mercuriels, des formes ambiguës portent une puissance cinétique rappelant les bactéries fusionnant pour alchimiser le tissu conjonctif. Des pièces comme Corps nu, SalinibacterRuber et You Look a Bit Glassyapparaissent douces, molles, collantes comme une substance ectoplasmique, se déplaçant à travers une tornade pour créer la vie. Des œuvres comme Dunaliella Salina apparaissent avec des striations et des indentations évoquant des cellules fossilisées. Dans Before You Leave, Let me Take You on a Brief Tour of myTreasureShip, deux grandes masses pliantes sont maintenues ensemble par un agent de liaison cartilagineux comme des os de baleine balayés sur une rive islandaise, des fragments entrelacés d’une créature disparue depuis longtemps ou d’une créature qui n’existe pas encore. Dans Love Nesting, la sculpture singulière apparaît comme deux êtres séparés fondant l’un dans l’autre, ou des larves bactériennes, sans ailes et magnétisées par la vie émergente. Comme si la chair était incisée pour révéler un monde intérieur de particules vivantes miniatures, le visiteur est invité à devenir un participant actif dans le processus de création, circulant et confrontant son propre corps à l’espace pour animer ces sculptures microbiennes dans les espèces successives observées dans METAMORPHOSE.
METAMORPHOSE
En tant que zone transitoire, une série d’espèces bleues et noires émergent de leurs origines embryonnaires. Bien que partiellement amorphes, les sculptures collisionnent des états à la fois abstraits et littéraux, prenant des traits animalistes tels que des pieds ou des formes tubulaires ressemblant à des cous comme on le voit dans Camponotusqui suggère un labyrinthe de routes potentielles vers la croissance. Elles captivent le regard avec une beauté étrange et hypnotique appelant le spectateur à entrer dans les espèces, comme des sirènes appelant les âmes à se pencher plus près. I Stopped Taking Medicine and Let the Purple Bloomestinspirée par A Door Into the Ocean, de Joan Slonczewski. Ici, la forme ressemblant à des pieds de la sculpture stabilise sa fluidité, l'amenant d’une amalgamation cellulaire à un être renforcé. Lady Lystraillynousconfronte avec un regard inconnu comme une sirène enchantée, son corps bouillonne dans les profondeurs céruléennes, se levant pour avaler le regardeur dans son emprise internalisée.
BESTIAIRE
En entrant dans la zone finale, BESTIAIRE nous appelle à nous tenir debout et à confronter un mur de douze chimères, alignées comme des sculptures de taxidermie dans une grande salle, des spectacles de parties entièrement formées. Ces créatures hybrides inconnues connotent une nouvelle vie, avec des noms humains tels qu’Ezra, Bobby et Heather. Régnant sur eux se trouvent deux interespèceshumain-animal, Deucalion et Pyrrha avec la force et le poids d’un sphinx, ils deviennent des protecteurs bienveillants, comme dans l’Égypte ancienne, ils prennent un rôle de gardiens de l’espace sacré de BESTIAIRE.
écrit par Charlotte Brohier
Emily Orta (née en 1999 à Paris) est une sculptrice franco-anglo-argentine autodidacte, résidant à Paris. Son œuvre s’intéresse à la fragilité des organismes et des systèmes vivants. Elle brouille délibérément les frontières entre animé et inanimé, réel et irréel, invitant le spectateur à s’interroger sur les complexités de l’existence. Son geste intuitif de sculpter l’argile cherche à capter la beauté complexe de la vie et la promesse de possibles méconnus. Ce faisant, elle invite les spectateurs à explorer leurs propres relations avec le monde naturel et à contempler la tapisserie évolutive et mystérieuse de l’existence humaine. Orta a développé un langage personnel unique, ancré dans le processus de création. Elle repousse les limites techniques du médium de la céramique grâce à la création de ses propres émaux et à un processus de cuisson rigoureuse — et quelque peu orthodoxe —, entre tradition et expérimentation. Ses céramiques sont des expressions éloquentes de la beauté trouvée dans l’ambiguïté.
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