Une visite « céramique » à la FIAC 2016
La Fiac est une foire.C’est du marché qu’elle donne un aperçu, de la tranche haute du marché, puisque les frais induits par une présence sous la verrière du Grand Palais exigent pour les participants, de réaliser des ventes importantes. De plus, la Fiac est gérée par un comité qui sélectionne les galeries et ce qu’elles proposent d’exposer. Les galeries candidates répondent à l’idée qu’elles se font des critères de sélection et du marché parisien. Ce qui est présenté à la Fiac correspond à ce que le marché considère comme relevant de l’art contemporain, aujourd’hui. Ces conditions rendent difficile la présence de la céramique, surtout à Paris. Et c’est un angle d’observation qui doit être pris pour ce qu’il est. Une visite intéressée par l’art céramique demande beaucoup d’attention. Les plaisirs sont trop rares. Mais il n’en demeure pas moins qu’il y a de très bons moments. Et puis, les œuvres céramiques fonctionnent comme un clé qui nous ouvre la porte sur le travail et le parcours d'artistes que nous ne connaissions pas.
C’est aussi l’occasion de découvrir des artistes qu’aucun lieu parisien ne présente, ainsi cette année, Yoshitomo Nara, Caroline Achaintre et Marc Camille Chaimowicz., tous deux d'origine française mais qui travaillent à l'étranger. Dans cette catégorie, l faut accorder une mention spéciale à Liz Larner, que l’on ne voit qu’ici, mais qui présente cette année une plaque qui est sans doute la plus belle œuvre céramique de la foire.
Du coté, des grands maîtres, on retrouve, comme chaque année, un ensemble d’œuvres de Fontana chez Karsten Greve et de façon plus étonnante, une pièce historique de Miro à la galerie canadienne Landau Fine Arts. En revanche, on ne note pas de retombées de l’exposition Céramix. Johan Creten, Thomas Schütte, Ai Weiwei, Simone Fattal sont présents mais ils l’étaient déjà l’an dernier.
Yoshitomo Nara est un artiste japonais né en 1959. Il était présenté par la galerie Blum & Poe de Los Angeles qui lui consacrait un stand entier à l’entrée du Grand Palais. Yoshitomo Nara appartient au mouvement pop japonais influencé par le manga et le punk. Il affectionne la céramique mais il est connu par ses dessins, qui s’apparentent à la bande dessinée et livrent, au-delà d’une naïveté apparente, une image critique de la société. Yoshitomo Nara est un artiste très connu au Japon qui expose dans le monde entier. La galerie présentait un ensemble de figures, en terre mate, au modelage très sensible.
Caroline Achaintre était présentée par la galerie londonienne, Arcade, dans la mezzanine du Grand Palais. Caroline Achaintre est une artiste française née à à Toulouse en 1969, qui vit travaille à Londres. Elle s’exprime sur différents matériaux, le papier pour le dessin mais surtout les fibres, la laine en particulier, et la céramique. Elle fait référence au primitivisme et à l’art tribal. Elle présente aussi des installations. Les trois pièces de céramique présentée à la Fiac partaient d’une matière froissée pour évoquer des masques. Caroline Achaintre sera exposée au FRAC Champagne Ardennes à Reims du 27 janvier au 23 avril 2017 qui présentera à cette occasion sa première monographie.
Marc Camille Chaimowicz est un artiste français né à Paris en 1947. Il était présenté par la galerie Neu de Berlin, également dans la mezzanine. Chaimowicz est un amateur des objets, des ameublements et des décors. Il présentait une installation murale de vases émaillés, conçue pour la Triennale de Milan qui se tient du 16 octobre 2016 au 17 janvier 2017. Il utilise ici la céramique pour ses résonances avec l’intime, les espaces intérieurs, la vie quotidienne.
Marc Camille Chaimovicz n’est pas inconnu en France. Il a notamment conçu des ouvrages accompagnant des expositions qui ont été acquis en 2014 par le musée des Abattoirs de Toulouse « l’idée même de bibliothèque, de collection d’ouvrages et de motifs est en résonance directe avec l’œuvre de Marc Camille Chaimowicz. Depuis les années 1970, celle-ci poursuit une histoire du dandysme, un point de vue qui floute sans cesse la distinction entre l’art et la vie. Huysmans bien sûr, mais également Cocteau et Genet sont les auteurs symptomatiques de cet emmêlement. Les deux derniers viennent d’ailleurs régulièrement hanter l’œuvre de l’artiste…. Il n’y a toutefois rien d’illustratif dans le corpus imprimé de Chaimowicz. Pas davantage que l’on peut qualifier de "décoratif" son œuvre plastique. Son attachement au décor n’est pas celui d’un art minoré, mais la mise en exercice d’un art envahissant, enivrant, omniprésent. ». extrait du texte des Abattoirs.
Liz Larner
La galerie, Regen Projects, de Los Angeles présentait, une fois de plus, l’artiste californienne qui travaille la sculpture et les installations, Liz Larner, née en 1960 à Sacramento. Une seule œuvre cette année, mais une œuvre magnifique (vendue d’ailleurs) mettant en valeur la matière et produisant une relation inédite avec l’espace. La pièce est composée de deux plaques placées dans deux plans différents, l’une un peu en retrait de l’autre et qui se recouvrent à peine. On découvre la tranche de la plaque frontale qui fait ainsi découvrir l’intérieur de la matière. Les plaques sont détachées du mur. L’œuvre est murale mais le volume se détache dans l’espace. La couverte est émaillée, probablement recouverte de plusieurs couches d’émail faisant vibrer les nuances de la couleurs. Mais l’artiste a aussi introduit des cailloux et des minéraux, créant un contraste entre brutalité et préciosité. D’une certaine façon, un élément de l’univers vient à nous.
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Commentaire de michel meynet | 10.11.2016
Merci Bernard, non seulement grâce à toi la province bénéficie d'une idée de ce qui se passe à Paris mais aussi on peut voir des choses faites par des étrangers...On ne sait jamais, ces bougres peuvent être aussi bons que nous ! En la circonstance je ne suis pas trop emballé par les chinois et les japonais même si une oeuvre sort de Sèvres. La française de Londres n'a pas inventé la poudre mais c'est spectaculaire et décoratif donc ça devrait se vendre.En revanche je comprends que le travail de l'américaine ait déjà été vendu, c'est à la frontière extrême de la céramique mais ça reste de la céramique et c'est une version moderne des pierres de rêve chinoise que j'aime. Enfin le Creten plait beaucoup à Denise et le Schütte me plait bien. Nous restons un peu sur notre faim et ce n'est pas un reproche,les dimensions des oeuvres ne sont pas toujours perceptibles et nous imaginons que les prix sont astronomiques sans savoir s'il s'agit de la stratosphère ou plus haut encore!! Pour finir sur une note optimiste, les galeries étrangères présentent à Paris des oeuvres faites par des français(es), c'est tout de même pas si mal.